5. Préface
Les Etats parties à la Convention des droits de l’enfant (CDE) ont des obligations vis-à-vis de tous les enfants
qui se trouvent sur leur territoire, que l’enfant soit national ou étranger, demandeur d’asile, réfugié, migrant,
accompagné ou non accompagné. Ces obligations ne peuvent être restreintes arbitrairement à l’égard d’un
groupe d’enfants particuliers. La jouissance des droits énoncés dans la Convention n’est donc pas limitée aux enfants
de l’État partie et doit dès lors impérativement, sauf indication contraire expresse de la Convention, être accessible à tous
les enfants − y compris les enfants demandeurs d’asile, réfugiés ou migrants −, sans considération de leur nationalité,
de leur statut au regard de l’immigration ou de leur apatridie1.
L’étude que vient de mener Terre des hommes en 2008 et 2009 touche une question peu abordée (taboue?): la
disparition de mineurs non accompagnés (MENA) placés en institutions. Dans son Observation Générale nº 6,
pourtant largement ouverte à toutes les problématiques, le Comité des droits de l’enfant de l’ONU n’aborde
pas cette situation. C’est donc le premier mérite de ce document que de rendre visibles des enfants devenus
invisibles, de comparer la situation de quatre pays européens recevant nombre d’enfants migrants et de formuler
une série de recommandations basées sur des observations. Sans prétention à l’exhaustivité et sans intention
moralisatrice ni stigmatisante, cette étude permettra à chaque Etat européen d’en tirer grand bénéfice dans
l’analyse de sa situation domestique et de s’inspirer des recommandations, qui sont de portée universelle.
Les mineurs non accompagnés constituent une catégorie spécifique, parce qu’ils sont enfants, parce qu’ils sont
migrants et parce qu’ils ne sont pas accompagnés. Cette triple vulnérabilité exige une considération et une
protection particulières. L’art. 20, par. 1 de la CDE reconnaît cette situation: Tout enfant qui est temporairement
ou définitivement privé de son milieu familial (…) a droit à une protection et une aide spéciales de l’Etat.
Dès lors que les enfants reçoivent une protection de remplacement – et dans les cas étudiés dans ce dossier,
un placement institutionnel - ils ont droit à la même attention et aux mêmes prestations de qualité que tous
les autres enfants placés, dès leur admission comme dans les préparatifs et l’exécution de la libération. Si donc
un enfant, quel que soit son statut, et quel qu’en soit le motif, disparaît d’une institution, toutes les procédures
habituelles doivent être déclenchées: la responsabilité de l’institution, et celle de l’Etat, sont engagées.
Les recommandations présentées dans cette étude, fondées à la fois sur des observations précises et sur les
droits, les garanties individuelles et les grands principes de la CDE (non-discrimination, intérêt supérieur de
l’enfant, doit à la vie, survie et développement, droit d’être entendu) constituent une approche sérieuse per-
mettant d’éviter l’angélisme si souvent décrié.
Espérons que ce dossier permettra à ceux qui détiennent des responsabilités, d’une part d’y reconnaître leurs
difficultés et d’autre part de s’inspirer des recommandations pour le traitement approprié d’une situation
alarmante que l’on ne peut ignorer ni banaliser.
Jean ZERMATTEN
Vice-président du Comité des Droits de l’enfant des Nations Unies
6.
7. Sommaire
INTRODUCTION 8
MÉTHODOLOGIE 9
REMERCIEMENTS 10
RÉSUMÉ 11
1. QU’EST-CE QU’UN MINEUR ÉTRANGER NON
ACCOMPAGNÉ (MENA)? 15
a) Qu’est-ce qu’un mineur? 16
b) Qu’est-ce qu’un «mineur étranger non accompagné»? 16
2. L’ACCUEIL ET LA PRISE EN ChARGE dES MINEURS
NON ACCOMPAGNÉS 19
a) Raisons de la migration 20
b) Combien sont-ils? 20
c) Qui sont ils? 21
d) Comment arrivent-ils? 22
e) Processus de prise en charge d’un MENA 23
3. DISPARITIONS : UNE AMPLEUR MÉCONNUE ET
dES ChIFFRES INCERTAINS 31
4. QUE SAVONS-NOUS dES MENA QUI dISPARAISSENT? 35
a) Quels mineurs non accompagnés disparaissent? 36
b) Pourquoi les MENA disparaissent? 38
c) Quels sont les risques encourus par les MENA disparus? 43
d) Quelle est la terminologie utilisée? 49
e) Quelle est la procédure suivie après la disparition d’un MENA? 51
5. QUI PORTE LA RESPONSABILITÉ LÉGALE dES MENA
FACE AUX dISPARITIONS? 57
a) Des réponses variées 58
b) Les textes internationaux définissent les obligations de l’Etat 58
c) Quels sont les recours juridiques invernationaux envisageables? 60
6. RECOMMANdATIONS 67
a) Recommandations générales 68
b) Recommandations aux gouvernements 69
c) Recommandations aux autorités judiciaires 72
d) Recommandations aux responsables d’institutions 73
CONCLUSION 78
BIBLIOGRAPHIE 79
8. Des enfants de trop en Europe?
Introduction
Dès la fin de 1999, la Fondation Terre des hommes a entrepris de travailler à la prévention, à l’accueil et au
rapatriement volontaire assisté de mineurs venant d’Albanie et rencontrés en Grèce2. Au terme d’une enquête
de plusieurs mois, la délégation de Terre des hommes et ses partenaires ont développé des opérations spéci-
fiques de lutte transnationale contre la traite des enfants3.
Durant l’enquête préliminaire, des informations diffuses, approximatives et invérifiables, faisaient cependant
état de centaines d’enfants étrangers placés dans les institutions par les autorités des pays d’accueil, mais qui
disparaissaient de ces institutions: fugues, départs volontaires, ou sous une forme ou une autre de contrainte.
D’autres informations parcellaires de même nature, collectées de manière occasionnelle, nous sont progressive-
ment parvenues de différents pays européens. Jusqu’au jour où il nous est apparu que derrière ces informations
allusives se cachaient probablement des réalités humaines à une échelle autrement plus significative que ce qui
est présenté comme un simple phénomène marginal et secondaire. Rien pourtant ne justifie que des enfants,
qui ont une capacité relative de discernement, d’expression et le cas échéant, de défense, disparaissent de toute
visibilité sociale et de toute responsabilité légale, n’entraînant comme réaction, au mieux, qu’un sentiment de
fatalité et d’impuissance et au pire une sorte de soulagement face aux coûts et aux responsabilités légales…
qui disparaissent en même temps que les enfants eux-mêmes.
Si nos propres enfants étaient placés en institution, pour quelque motif que ce soit, par des autorités du pays,
celles-ci, en cas de disparition, engageraient avec effet immédiat des procédures de recherche tous azimuts
et de manière durable. Or concernant les mineurs étrangers non accompagnés, la Convention internationale
relative aux droits de l’enfant, ratifiée par la quasi-totalité des pays du monde, est très explicite. Selon l’alinéa
2 de l’article 22, le mineur étranger non accompagné se voit accorder … la même protection que tout autre
enfant définitivement ou temporairement privé de son milieu familial pour quelque raison que ce soit. Les mineurs qui
disparaissent des institutions où les autorités les ont placés pour leur protection, sont-ils soumis aux mêmes
procédures de recherche? Sinon, serait-ce parce qu’étant non accompagnés, personne ne les réclamera?
Il nous est donc apparu essentiel de procéder à une enquête sur ces réalités, sur la validité des termes employés
pour les qualifier, sur la responsabilité légale des différents acteurs concernés, en essayant d’appréhender l’ex-
trême complexité des situations, de déterminer les meilleures pratiques constatées chez les professionnels,
et de formuler des recommandations sur le plan légal et institutionnel. Il faut, au moins, pouvoir dire que le
maximum a été fait - obligation de moyens - à défaut de garantir mécaniquement la réussite des procédures,
sachant qu’il ne peut y avoir de solution uniforme face à la diversité des situations.
Toutes les littératures du monde regorgent de récits bouleversants d’humanité, de migrants, y compris mineurs,
dans des parcours du combattant où ils ont parfois trouvé, malgré tout, des opportunités de forger leur destin.
Pour des centaines d’enfants, en Europe, qui disparaissent des institutions où ils ont été placés par les autorités,
le pire n’est pas sûr. Mais, pour une partie d’entre eux, le pire est possible et personne n’en saura jamais rien.
Nous sommes conscients que certains enfants migrent en quête d’un avenir meilleur et méritent d’être soutenus
dans leurs efforts. Nombre d’entre eux arrivent sans encombre, ce qui n’enlève rien à leur besoin de protection
car UN SEUL enfant exploité ou trafiqué, c’est déjà trop. D’où l’enquête que nous avons réalisé.
Quoi qu’il en soit, tout doit être mis en œuvre pour qu’on ne puisse plus jamais lire la phrase suivante: Presque
90 % des requérants d’asile (…) quittent le domaine de l’asile par des départs non officiels. Sans cette soupape, la
politique d’asile devrait assumer un fardeau social et financier qu’elle ne pourrait pas porter. Les disparitions - qu’on le
veuille ou non - remplissent ainsi une fonction clé dans la gestion des flux migratoires4.
Bernard BOËTON
Secteur Droits de l’enfant - Terre des hommes - bernard.boeton@tdh.ch
8
9. Des enfants de trop en Europe?
Méthodologie
L’enquête s’est déroulée en deux phases, d’avril 2008 à août 2009. La première phase, jusqu’en août 2008,
depuis le Bureau régional de protection de l’enfance de Budapest, a consisté en la prise d’informations concer-
nant le public des MENA et plus précisément sur l’objet de notre étude: les MENA placés en institution et
qui disparaissent. La lecture de rapports et les interviews téléphoniques avec les nombreux professionnels
dans les pays d’accueil des mineurs a permis une première récolte d’informations. Désirant garder une cer-
taine distance par rapport aux chiffres annoncés, et aux informations collectées, parfois contradictoires, il a
été décidé d’aller au plus près de la réalité et de vérifier les informations. Débute alors une seconde phase:
la visite des pays d’accueil des mineurs.
Quatre pays ont été sélectionnés: la Belgique, la France, la Suisse et l’Espagne. Le choix des Etats a été
motivé par plusieurs raisons: tous accueillent des MENA et disposent de centres d’accueil spécialisés; certains
réussissent plus ou moins dans le travail auprès de ce public et la comparaison nous a semblé intéressante;
les contacts avec les professionnels dans ces Etats ont été bons lors de la première phase et beaucoup ont
été prêts à coopérer... Environ 90 professionnels qui travaillent auprès des MENA ont ainsi été rencontrés:
directeurs d’institutions, éducateurs, tuteurs, juges des enfants, procureurs, policiers, ONG, chercheurs,
avocats, acteurs de la protection de l’enfance, Défenseurs du peuple, services des migrations… Dans l’ensem-
ble, l’accès aux professionnels fut simple, et au fur et à mesure des entretiens, nos interlocuteurs nous ont
permis de rencontrer d’autres acteurs. Ajoutons également la visite de quelques associations et autorités au
Maroc, en lien avec le contexte espagnol et belge. Nous avons également pu rencontrer quelques mineurs
directement, tout en respectant les exigences du code de conduite de la Fondation Terre des hommes vis-
à-vis des enfants.
Le choix des interlocuteurs ne s’est pas fait sous l’angle d’une quelconque représentativité statistique des
institutions, il s’est fait au fil des interviews et en fonction des questions et aspects de la thématique à
approfondir. Les interviews n’ont pas été enregistrées, la prise de note a été préférée. Un traducteur était
présent selon les nécessités. Un engagement ferme d’anonymat a été pris envers tous nos interlocuteurs,
même ceux qui ne l’exigeaient pas. Cela leur a permis de se sentir plus à l’aise pour échanger à partir de
leurs convictions et leurs questionnements. Aucune source n’est donc citée, le but de cette enquête n’étant
nullement de stigmatiser un pays ou une institution en particulier, mais de faire ressortir les problèmes qui
se posent ainsi que les initiatives permettant de travailler à l’intérêt supérieur de ces enfants.
9
10. Des enfants de trop en Europe?
Remerciements
A la demande du Secteur «Droits de l’enfant» de la Fondation Terre des hommes - aide à l’enfance, ce rapport a
été rédigé par Sofia Hedjam, juriste, sur la base d’enquêtes de terrain effectuées entre avril 2008 et août 2009 en
Belgique, en France, en Espagne et en Suisse. Céline Danguin, stagiaire du Secteur Droits de l’enfant a également
participé au travail de recherche. Ont également apporté leur concours à l’encadrement de l’enquête et à la
rédaction de ce rapport, Bernard Boëton, responsable du Secteur Droits de l’enfant et Vincent Tournecuillert,
responsable du projet régional de protection de l’enfance de Budapest en Hongrie.
Ont également apporté leur concours à la rédaction de ce rapport Véronique Dubois (juriste), Mirela Shuteriqi
personne ressource de la Fondation contre les trafics d’enfants, ainsi que l’équipe du Projet régional de pro-
tection de l’enfance de Budapest. Nous soulignons également l’apport de Nathalie Heppell par l’étude qu’elle
a menée sur le même sujet au Canada, dont quelques éléments apparaîtront au cours de notre analyse.
Nous tenons à remercier les 89 professionnels et les 40 mineurs qui ont accepté de nous recevoir et sans qui
cette enquête n’aurait pas été possible. Leurs contributions et leurs précieux témoignages constituent le cœur
de ce rapport. Merci tout particulièrement à V.G., éducateur en Espagne, qui nous a permis de l’accompagner
pendant son travail et qui nous a ouvert de nombreuses portes; merci aux mineurs et aux éducateurs du centre
S. de Bruxelles pour leur accueil. Merci enfin à tous nos interlocuteurs pour leur confiance, leurs conseils, leur
disponibilité, et qui ont saisi l’occasion de cette enquête pour faire part de leur expérience afin d’améliorer la
situation des mineurs étrangers non accompagnés à travers l’Europe.
10
11. Des enfants de trop en Europe?
Résumé
Sur la base d’informations parcellaires recueillies depuis plusieurs années, la Fondation Terre des hommes-aide
à l’enfance a procédé, en 2008 et 2009, à une enquête dans 4 pays sur la disparition de nombreux mineurs
étrangers non accompagnés des institutions où les autorités judiciaires ou administratives les ont placés.
De cette enquête, réalisée essentiellement par interviews auprès d’environ 90 responsables professionnels, il
ressort les constats suivants:
• la disparition de mineurs des institutions n’est pas un phénomène marginal ou exceptionnel: il s’agit bien
d’un pourcentage, variable mais significatif, d’une population donnée, lequel peut atteindre 50 % selon les
institutions et les pays concernés;
• le phénomène est connu au niveau local ou régional, mais la publication de statistiques nationales consolidées
n’existe pas dans les contextes dans lesquels nous avons enquêtés;
• la diversité, au niveau local et régional, des critères de prise en charge et de suivi des mineurs, le cloisonnement
dans le fonctionnement des services concernés, comme la diversité des termes employés (disparitions , fugues,
départs sans adresse, etc.), ne facilitent en rien la perception de l’ampleur et de la gravité du phénomène;
• une partie des responsables d’institutions considèrent que le terme de disparition n’est pas approprié, estimant,
pour certains, que ce terme supposerait de diligenter une enquête judiciaire; quelques-uns, très minoritaires,
considèrent que la disparition n’est que l’expression du libre choix du mineur;
• d’autres responsables d’institutions reconnaissent leur responsabilité professionnelle directe dans ce phéno-
mène, qu’ils considèrent avec d’autant plus de gravité qu’ils se reconnaissent impuissants pour le réduire;
• un des facteurs déterminants dans l’explication des disparitions est la perception que la plupart des mineurs
(majoritairement garçons de 14 à 17 ans) ont de l’avenir qui s’offre à eux à travers la décision de placement.
Que signifie être placé et protégé pour des mineurs qui ont souvent franchi des épreuves humainement
extrêmes, contraints d’atteindre un degré de maturité adulte, et dont on exige qu’ils s’adaptent au règlement
intérieur d’une institution en général conçue pour des mineurs plus jeunes? A quoi s’ajoute la certitude que,
quoi qu’on leur dise, ce placement est la salle d’attente de l’expulsion vers le pays d’origine, alors que leur
projet est en général très précis et qu’ils veulent travailler dans le pays de destination;
• un MENA n’arrive que très rarement seul dans un pays d’accueil: si l’institution se comporte comme le
simple exécutant d’une décision judiciaire ou administrative de placement et que, très rapidement, le mineur
ne perçoit pas son intérêt à long terme au sein de l’institution, la disparition est quasi-automatique. Tous
les professionnels estiment que la plupart des disparitions se produisent dans un délai très court après
l’admission dans leur centre. Certains savent qu’ils vont rejoindre leur famille, ce qui n’est pourtant pas
nécessairement une garantie de protection;
• le principe de recherche active de mineur disparu d’une institution n’est que très peu appliqué, contrairement
à la recherche immédiate en cas de disparition d’un enfant national. Cet état d’esprit pourrait aisément être
interprété comme une discrimination.
11
12. Des enfants de trop en Europe?
En conséquence de cette enquête et des bonnes pratiques constatées, la Fondation Terre des hommes aide à l’enfance
propose les recommandations suivantes:
• Un MENA doit être traité d’abord en fonction des normes légales de protection de l’enfant, et non pas sous
l’angle exclusif de l’immigration illégale.
• Un mineur qui a traversé de multiples épreuves pour parvenir dans le pays d’accueil est comme tous les
êtres humains: il ne modifiera sa situation et ses ambitions que s’il le décide, selon la perception qu’il a de ses
propres intérêts. Tout doit être mis en œuvre pour qu’il soit acteur de son propre développement, par une
écoute attentive et compétente afin de tenir compte de ses objectifs. Le suivi doit s’inspirer de l’Observation
Générale n°6 du Comité des droits de l’enfant: le but ultime de la prise en charge d’un enfant non accompagné
ou séparé est de définir une solution durable qui permette de répondre à tous ses besoins en matière de protection,
tienne compte de l’opinion de l’intéressé et, si possible, mette un terme à la situation de non accompagnement ou
de séparation5.
• La détermination de l’intérêt supérieur de l’enfant ainsi que la définition d’une solution durable et individuelle
sont des processus pluridisciplinaires, qui intègrent la collecte et le recoupement d’informations dans le pays
d’origine et si possible l’implication active de professionnels de protection de l’enfance de la localité d’origine
du mineur. Les échanges de données, y compris entre pays européens, faciliteront ainsi le suivi des MENA et
leur protection, ce qui passe par une harmonisation européenne de la nomenclature et des procédures de
collecte de ces données.
• Dans la recherche de solutions durables, il ne peut y avoir de retour dans le pays d’origine sous la contrainte:
les droits de l’enfant sont applicables dans le pays d’origine comme dans celui d’accueil. Un mineur ne peut
revenir dans son pays d’origine sans un minimum de garanties que ses droits élémentaires y seront aussi
respectés.
• Les autorités publiques doivent organiser la coordination entre les secteurs publics et privés, notamment à
travers les réseaux d’associations, pour la recherche des mineurs disparus, et ouvrir des formules d’accueil
et de prise en charge des mineurs victimes de traite.
• Les autorités judiciaires doivent mettre en œuvre le droit à l’identité pour tous les mineurs, lorsque c’est
nécessaire, et s’assurer que leur représentation légale soit indépendante des responsables des institutions
où elles les placent.
• Les autorités judiciaires doivent systématiquement diligenter une procédure de recherche dès la notifica-
tion de la disparition d’un mineur d’une institution de placement, et engager toute procédure pour être en
mesure de répondre aux autorités ou aux familles des pays d’origine des mineurs disparus, en faisant appel, si
nécessaire, à tous les canaux et réseaux des associations et institutions compétentes, publiques et privées.
• L’observation des institutions qui ont un faible taux de disparition montre que la population des MENA n’étant
aucunement homogène, l’approche et le suivi des mineurs doivent être adaptés aux situations individuelles, par
l’écoute de leurs besoins immédiats et de leurs projets de vie. L’hypothèse que l’accompagnement s’étende
au-delà du jour de leur majorité civile doit être envisagée, ainsi que d’autres options non institutionnelles.
Mais dans tous les cas, l’enfant doit bénéficier d’une préparation au départ, comprenant l’apprentissage de
sa propre protection.
• La formation continue des personnels des institutions à l’écoute, au dialogue et à la médiation culturelle,
est une des clés de la réussite de l’accompagnement des mineurs, et par conséquent, de la réduction du
nombre de disparitions. Une capitalisation de l’expérience acquise et des leçons apprises par les différents
acteurs, publics et privés, est essentielle, y compris dans le domaine de la prévention de la violence et de la
maltraitance, dont les abus sexuels au sein des institutions de prise en charge font partie.
12
13. Des enfants de trop en Europe?
D’une manière générale, l’angélisme est du côté de ceux qui pensent qu’une pure et simple politique de
répression et d’expulsion est efficace; le réalisme est du côté de ceux qui travaillent de manière adaptée et
diversifiée selon les situations. L’approche strictement répressive se satisfait pleinement, comme une sorte de
lâche soulagement, des disparitions des mineurs étrangers des institutions. Ils s’expulsent par eux-mêmes, ce qui
est la solution… la moins coûteuse et la plus efficace!
Notes de l’introduction
1 Comité des droits de l’enfant. Observation Générale N°6: traitement des enfants non accompagnés et des enfants séparés en
dehors de leur pays d’origine, CRC/GC/2005/6. Genève, 1er septembre 2005. Ch. 12.
2 Ce programme a obtenu le prix des Droits de l’Homme de la République française en 2002.
3 Pour obtenir des détails sur le modèle d’action «TACT», consulter le site Child protection Project in Europe de la Fondation Terre
des hommes, http://tdh-childprotection.org/content/view/337/.
4 Office fédéral des réfugiés Suisse, L’Afrique en Suisse; Eléments d’analyse et de politique. Berne, octobre 2002.
5 Idem note 1.
13
16. Des enfants de trop en Europe? - 1. Qu’est-ce qu’un mineur étranger non accompagné (MENA) ?
a) Qu’est-ce qu’un mineur 1. Les États parties prennent les mesures appropriées
pour qu’un enfant qui cherche à obtenir le statut de
réfugié ou qui est considéré comme réfugié en vertu des
L’enfant est un être humain à part entière âgé de moins règles et procédures du droit international ou national
de 18 ans, dont la dignité est égale à celle de tout être applicable, qu’il soit seul ou accompagné de ses père et
humain. Il dispose, à cette étape transitoire de la vie, mère ou de toute autre personne, bénéficie de la pro-
d’une capacité relative, selon son âge et sa maturité, tection et de l’assistance humanitaire voulues pour lui
de discerner, de s’exprimer et de se défendre. Et en permettre de jouir des droits que lui reconnaissent la
même temps, il est titulaire d’un droit inaliénable à se présente Convention (…)
développer dans un environnement sain et durable, dans
une communauté humaine, culturelle et sociale, qui lui 2. À cette fin, les États parties collaborent (…) pour
doit une attention prioritaire, en termes d’affection, protéger et aider les enfants qui se trouvent en pareille
de protection, d’éducation et de santé, puisqu’il en situation et pour rechercher les père et mère ou autres
constitue la pérennité et le progrès6. membres de la famille de tout enfant réfugié en vue
d’obtenir les renseignements nécessaires pour le réunir à
sa famille. Lorsque ni le père, ni la mère, ni aucun autre
membre de la famille ne peut être retrouvé, l’enfant se
b) Qu’est-ce qu’un «mineur voit accorder, selon les principes énoncés dans la présente
étranger non accompagné»? Convention, la même protection que tout autre enfant
définitivement ou temporairement privé de son milieu
familial pour quelque raison que ce soit.
Normes internationales
Le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Normes européennes
Réfugiés définit les enfants séparés comme étant des Le programme Separated Children in Europe9, utilise
personnes de moins de 18 ans, qui se trouvent à l’exté- le terme général d’enfants séparés. Cette expression
rieur de leur pays d’origine ou du pays de leur résidence désigne aussi bien les mineurs qui se trouvent en dehors
habituelle et qui sont séparés de leurs parents ou de la de leur pays d’origine et sont séparés de leurs deux parents
personne qui légalement ou selon la coutume s’occupe ou de leur ancien tuteur légal/coutumier que ceux qui
d’eux à titre principal. Ces enfants peuvent être seuls ou vivent avec des membres de leur famille élargie. La
accompagnés d’un ou plusieurs membres de leur famille déclaration de bonnes pratiques considère en effet que
élargie ou d’autres adultes n’ayant pas de lien familial les adultes qui peuvent accompagner ces enfants ne
avec eux. sont pas forcément aptes ou appropriés pour endosser
une telle responsabilité.
Le Comité des droits de l’enfant, dans son Observation
générale n°6, différencie les mineurs non accompagnés Quant au droit communautaire, les principales dispo-
des mineurs séparés. Selon ce texte, par enfant non sitions sont contenues dans la résolution du Conseil
accompagné (également appelé mineur non accompa- de l’Union européenne du 26 juin 1997. Ce texte
gné), on entend un enfant, au sens de l’article premier de utilise la notion de mineurs non accompagnés, définie
la Convention7, qui a été séparé de ses deux parents et comme les ressortissants de pays tiers âgés de moins de
d’autres membres proches de sa famille et n’est pas pris dix-huit ans qui entrent sur le territoire des États membres
en charge par un adulte investi de cette responsabilité sans être accompagnés d’un adulte qui soit responsable
par la loi ou la coutume. Puis le texte ajoute par enfant d’eux, de par la loi ou la coutume, et tant qu’ils ne sont
séparé, on entend un enfant, au sens de l’article premier pas effectivement pris en charge par une telle personne.
de la Convention, qui a été séparé de ses deux parents ou La présente résolution peut également s’appliquer à des
des personnes qui en avaient la charge à titre principal mineurs ressortissants de pays tiers qui ont été laissés seuls
auparavant en vertu de la loi ou de la coutume, mais pas après être entrés sur le territoire des États membres10. Ce
nécessairement d’autres membres de sa famille. texte porte sur le traitement qui devrait être appliqué
Un enfant séparé peut donc être accompagné par un à ces enfants, notamment en matière d’accueil, de
autre membre adulte de sa famille8. représentation et d’asile.
La Convention des Nations Unies relative aux droits
de l’enfant, dispose dans son Article 22:
16
17. Des enfants de trop en Europe? - 1. Qu’est-ce qu’un mineur étranger non accompagné (MENA) ?
Ajoutons qu’il existe d’autres directives qui contiennent que tout mineur étranger sur le territoire français
des dispositions relatives aux mineurs non accom- sans référant légal est potentiellement un mineur en
pagnés11. danger du seul fait de son isolement14 . Ces mineurs
relèvent de la protection de l’enfance régie par la loi
Le droit national du 5 mars 2007. Cette expression de mineur étranger
• En Belgique, un mineur étranger non accompagné isolé désigne en effet les mineurs qui arrivent sans
s’entend de toute personne de moins de dix huit ans, une personne titulaire de l’autorité parentale mais
non accompagnée par une personne exerçant l’autorité englobe également les enfants accompagnés par des
parentale ou la tutelle en vertu de la loi nationale du adultes qui ne sont ni les parents ni le tuteur, tel un
mineur, ressortissante d’un pays non membre de l’Espace membre de la famille élargie.
économique européen et étant dans une des situations
suivantes: soit avoir demandé la reconnaissance de la • En Suisse, on parle de mineur non accompagné, défini
qualité de réfugié; soit ne pas satisfaire aux conditions par le droit d’asile comme l’enfant qui a été séparé
d’accès au territoire et de séjour déterminées par les lois de ses deux parents et qui n’est pas pris en charge par
sur l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et l’éloi- un adulte investi de cette responsabilité par la loi ou la
gnement des étrangers12 .Les jeunes migrants originaires coutume15.
des Etats nouvellement entrés dans l’Europe, comme les
mineurs roumains ou bulgares, n’entrent plus dans la • En Espagne, le terme menores extranjeros no accom-
catégorie juridique des MENA. panados ne fait l’objet d’aucune définition. Ici encore,
quelques dispositions du droit des étrangers y font
• En France, les professionnels emploient le terme référence, en définissant implicitement le sujet migra-
de mineur étranger isolé sans qu’il existe de définition toire16.
de ce public13 . L’Etat français considère cependant
Notes de la section I
6 Définition utilisée par la Fondation Terre des hommes dans ses formations sur le terrain.
7 Le mot «Convention» se rapporte ici à la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant (1989), aussi appelée CDE.
8 Idem note 1.
9 Ce programme est une initiative commune de l’Alliance internationale Save the Children et du HCR, et a pour but «de défendre
les droits et l’intérêt supérieur des enfants séparés arrivés ou voyageant en Europe en instaurant une politique commune et en
s’engageant à une bonne pratique aux niveaux national et européen». Une Déclaration de bonnes pratiques a ainsi été rédigée
en 2004 et contient la définition du mineur séparé, p 2. Consulter le site Save the Children, http://www.separated-children-
europe-programme.org/index.html.
10 Conseil de l’UE, 26 juin 1997, résolution «relative aux mineurs non accompagnés ressortissants de pays tiers», article 1er
consulter le site Europa, http://europa.eu/legislation_summaries/other/l33041_fr.htm.
11 On pense notamment à la Directive du Conseil 2001/55/CE du 20 juillet 2001 relative à des normes minimales pour l’octroi
d’une protection temporaire à la Directive du Conseil 2004/81/CE du 29 avril 2004 relative au titre de séjour délivré aux res-
sortissants de pays tiers qui sont victimes de la traite des êtres humains ou ont fait l’objet d’une aide à l’immigration clandestine
et qui coopèrent avec les autorités compétentes. Consulter le site EUR-Lex, http://eur-lex.europa.eu/fr/index.htm.
12 Loi belge du 24 décembre 2002, Titre XIII, Chapitre 6 «Tutelle des mineurs étrangers non accompagnés». Consulter le site
Service public fédéral Justice, www.moniteur.be.
13 On trouve cependant quelques références dans le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA),
art. L 521-4.
14 Telle est la position de Mme Claire Brisset, ancienne Défenseure des enfants, qui estime, notamment en se basant sur les
articles 375 du code civil et L. 221 du Code de l’action sociale et des familles (CASF), que «tout mineur étranger isolé arrivant
doit par définition être considéré comme en danger». Rapport du défenseur des enfants, octobre 2000. C’est aussi la position
de Mme Dominique Versini, actuelle Défenseure des Enfants.
15 Directive 1.1.2008 sur la procédure d’asile en Suisse.
16 On citera en particulier l’article 92.1 du décret royal 2393/2004 du 30 décembre 2004 portant approbation du règlement
d’application de la loi organique 4/2000 sur les droits et libertés des étrangers en Espagne et leur intégration dans la
société.
17
20. Des enfants de trop en Europe? - 2. L’accueil et la prise en charge des mineurs non accompagnés
a) Raisons de la migration dans leurs pays d’origine. L’un de nos interlocuteurs
dénonce quant à lui la situation des mineurs en situation
de rue au Maroc, qui vivent en marginaux, subissent
Le nombreux rapports relatifs aux MENA reprennent des mauvais traitements de la part des autorités et
les travaux réalisés par la sociologue Angelina Etiem- ne disposent pas des conditions sanitaires ni des res-
ble17 qui dresse une typologie des différents profils des sources nécessaires à leur développement18.
mineurs non accompagnés en France. On y trouve tout
d’abord la catégorie des exilés, qui fuient une région
en guerre ou dans laquelle ils subissent des persécu-
tions politiques ou religieuses de la part de l’Etat, les b) Combien sont-ils?
mandatés, envoyés par leur famille pour travailler et
envoyer de l’argent ou étudier, les exploités, victimes • L’absence d’une comptabilisation fiable des MENA
de traite, d’exploitation sexuelle ou économique. On fait l’objet de nombreuses critiques19. La procédure
trouve également les fugueurs, qui ont quitté le domicile d’asile dans certains pays constitue le seul moyen d’ob-
familial ou l’institution dans laquelle ils étaient placés, tenir des chiffres. Mais ces données ne présentent
et enfin les errants, qui se trouvaient déjà en situation qu’une vision partielle de la réalité puisqu’il existe des
de rue dans leur pays. MENA non demandeurs d’asile, ils peuvent même être
majoritaires dans certains pays. Parmi eux, même si
Ces travaux abordent également le cas des mineurs qui certains enfants sont présents dans les centres, il existe
migrent seuls afin de rejoindre des membres de leur une zone grise impossible à évaluer qui concerne les
famille. Pour certains de ces mineurs, le séjour chez MENA non demandeurs d’asile qui n’entrent jamais
la famille, ou les amis dans certains cas, ne dure qu’un dans le système de protection. Ces derniers peuvent
temps. Il arrive que les personnes qui les accueillent ne par hasard être interceptés par la police mais le nombre
veuillent ou ne peuvent plus les prendre en charge, ou de signalements reflète le travail de la police et non le
que la situation se trouve différente de celle qu’imagi- nombre réel de MENA20 présents sur le territoire.
nait le mineur. Ces mineurs se retrouvent alors livrés
à eux-mêmes. Certains entreront dans le système légal Il importe de préciser aussi que certains MENA, après
de protection. leur sortie du centre d’accueil, sont admis dans une
autre structure et s’enregistrent sous une autre iden-
En Belgique, quelques institutions nous ont permis tité. L’absence de coordination dans la collecte des
de rencontrer des jeunes. Au cours de discussions données rend les statistiques aléatoires. Cependant,
informelles, individuelles ou collectives, nombreux les chiffres qui nous ont été communiqués pendant
sont ceux qui nous ont fait part de leur volonté de notre enquête sont les suivants.
rester en Belgique, afin de continuer leurs études ou
travailler. • En Belgique, selon le Service des tutelles pour
MENA, entre le 1er janvier 2008 et le 30 septembre
Mais pour le cas particulier des mineurs mandatés 2008, 1280 mineurs ont été pris en charge sur 1393
pour travailler et envoyer de l’argent à leur famille, de mineurs signalés. Selon ce service, les Indiens arrivent
nombreux professionnels s’inquiètent de la pression en nombre non négligeable mais ne demandent pas
psychologique qui pèse sur ces enfants. Certains sont l’asile. En 2007, pour la circulaire MENA, il y a eu 489
en crise, dû au fait que leur parents mettent tous cas pour lesquels il s’agissait du premier document et
leurs espoirs sur eux. Les obligations qui pèsent sur 1322 renouvellements de documents qui concernent
ces mineurs peuvent rendre difficile la mise en place 709 personnes, certains mineurs pouvant être comp-
d’alternatives pour leur avenir, car leur objectif est tabilisés plusieurs fois.
de travailler et de réunir de l’argent rapidement pour
l’envoyer à leur famille. L’Office des étrangers, pour l’année 2008, recense
470 demandes d’asile faites par des MENA21. Les deux
En Espagne, pour le cas des jeunes marocains, qui Centres d’Observation et d’Orientation, de janvier à
constituent la majorité des MENA, on considère géné- septembre 2008 comptent 1019 arrivées, et une partie
ralement que cette migration est d’ordre économique. seulement de ces mineurs demande l’asile.
Pour quelques associations, il est plus courant d’affirmer
que ces enfants cherchent avant tout une protection
et le respect de leurs droits, qu’ils ne trouvent pas
20
21. Des enfants de trop en Europe? - 2. L’accueil et la prise en charge des mineurs non accompagnés
• En France, selon l’Office français des réfugiés et la structure d’accueil. En région parisienne, les centres
apatrides, pour l’année 200822, 410 demandes d’asile accueillent des mineurs afghans, indiens, pakistanais,
concernant des mineurs isolés étrangers ont été intro- et des mineurs originaires de la Corne de l’Afrique
duites. On estime par ailleurs que le nombre total de ou de la République Démocratique du Congo. Les
MENA sur le sol français s’élève à environ 500023. jeunes originaires du Maghreb se trouvent peu dans
cette région. Dans le Nord de la France, les mineurs
• En Suisse, pour l’année 2008, on compte 631 requé- arrivent du Maghreb, de la République Démocratique
rants d’asile mineurs non accompagnés24. Selon certaines du Congo, d’Irak, d’Afghanistan et du Pakistan.
sources, en 2008, 40 MENA sont arrivés en zone de
transit de l’aéroport de Genève. Dans le département des Bouches-du-Rhône (Sud-est
de la France) sont principalement présents des jeunes
• En Espagne, peu de MENA présents sur le territoire originaires du Maroc et d’Algérie. On recense égale-
font une demande d’asile. On considère qu’il s’agit d’une ment des mineurs originaires d’Afrique subsaharienne,
migration économique et qu’ils ne remplissent pas les de Turquie et de Chine. Les professionnels admettent
conditions pour l’obtention du statut de réfugié. travailler peu avec les Roms, malgré le fait qu’ils en
croisent lors de leurs maraudes, souvent originaires
de Roumanie et de Bulgarie. Ces jeunes feraient partie
c) Qui sont-ils? selon eux de réseaux organisés.
Nationalités • En Suisse, pour l’année 2008, les principaux pays
• En Belgique, en 2007, pour la circulaire relative au d’origine des MENA requérants d’asile sont la Somalie,
séjour des mineurs étrangers non accompagnés25, les le Nigeria, la Guinée, la Gambie et l’Irak. Les filles sont
principaux pays d’origine sont le Maroc, la République majoritairement originaires du Nigeria, de Somalie et
démocratique du Congo, l’Afghanistan et l’Albanie. d’Erythrée. Les MENA qui arrivent à l’aéroport viennent
principalement de Gambie, de Guinée, d’Inde, du Sri
Les deux Centres d’Observation et d’Orientation Lanka, de Chine et du Nigeria28.
pour l’année 2007, ont accueilli des MENA principa-
lement originaires de Serbie, d’Afghanistan, d’Inde, de • En Espagne, les principaux pays d’origine des mineurs
Roumanie, d’Irak, de Guinée, d’Algérie et du Maroc. au sein des centres d’accueil sont le Maroc et les Etats
Selon l’Office des étrangers, pour l’année 2008, pour d’Afrique subsaharienne.
les inscriptions de demandes d’asile faites par des
mineurs, les principales nationalités sont l’Afghanistan, Age et sexe
la Guinée, la République Démocratique du Congo, la • En Belgique, en 2008, parmi les 470 demandes d’asile
Russie, l’Angola et le Cameroun. Chez les filles, les faites par des mineurs, 319 concernent des garçons. Il y
principales nationalités sont la Guinée et la République a 55 mineurs dans la classe d’âge de 0-13 ans, 93 mineurs
Démocratique du Congo26. dans la classe 14-15 ans et 322 mineurs ont entre 16 et
18 ans29. Selon nos interlocuteurs, les mineurs qui arri-
• En France, en 200827, sur 410 demandes d’asile concer- vent via l’aéroport seraient plus jeunes que la moyenne,
nant des mineurs étrangers, les principales nationalités certains sont âgés de 4 ans.
sont le Congo, l’Angola, la Russie, la Guinée Conakry
et le Sri Lanka. Dans les deux Centres d’Orientation et d’Observa-
tion, en 2007 sur 1325 jeunes accueillis, 73% sont des
Les demandes d’asile déposées à la frontière le sont garçons et 27% des filles. La majorité de ces mineurs
principalement par des jeunes issus du sous-continent est âgée de 15 à 17 ans.
indien et par des palestiniens ou prétendus tels selon
l’Office français de protection des réfugiés et apatrides. En France en 200830, sur 410 demandes d’asile concer-
On estime que 60% d’entre eux proviennent d’Asie, nant des mineurs étrangers, la part des filles au sein
36,1% d’Afrique, 2,3% d’Europe et 1,6% d’Amérique de ce public est de 37%, essentiellement d’origine
latine. Il y aurait une augmentation du nombre de congolaise.
jeunes chinois qui arrivent à l’aéroport Roissy Charles
de Gaulle selon certaines sources. Rares sont les jeu- • En Suisse, pour l’année 2008, 82,4% des MENA deman-
nes Roms qui intègrent les centres d’accueil français. deurs d’asile sont des garçons. La grande majorité de
Lorsque c’est le cas, ces mineurs quittent rapidement ces enfants a entre 15 et 18 ans31.
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22. Des enfants de trop en Europe? - 2. L’accueil et la prise en charge des mineurs non accompagnés
A titre d’information, une étude menée en parallèle au Plusieurs hypothèses sont avancées quant aux raisons
Canada32 souligne ceci d’étonnant que les catégories pour lesquelles les filles demeurent invisibles: certaines
d’âge pour les mineurs demandeurs d’asile sont les seraient utilisées dans le travail domestique, notamment
0-14 et les 15-24 ans. Les adolescents de 15 à 17 ans les filles marocaines, d’autres à des fins de prostitution.
sont donc mélangés à la catégorie des jeunes adultes. La force ou la fraude peuvent être utilisées pour pous-
Cette absence de distinction, déterminante pour l’appli- ser ces filles à migrer. Certaines parviennent à s’enfuir
cation ou non de nombreuses normes internationales, et intègrent alors le système légal de protection37.
aggrave aussi le manque de données sur ces mineurs
et complique donc l’amélioration de leur protection Les «filles mères»
par des solutions appropriées. En Belgique et en Suisse, les professionnels nous ont
signalé quelques cas de filles mères parmi les MENA,
Le rajeunissement constaté pour certaines âgées en moyenne de 16 ans et principalement ori-
nationalités ginaires d’Afrique. Selon eux, la prise en charge n’est
Plusieurs de nos interlocuteurs au Maroc, en France et pas assez adaptée pour ces filles plus vulnérables que
en Espagne s’inquiètent du rajeunissement des jeunes les autres38. A contrario, dans une structure belge, des
marocains qui tentent de gagner l’Europe. Certains appartements ont spécialement été aménagés au sein
tentent la traversée dès 8 ans. du centre pour accueillir les jeunes mères et leurs
enfants39.
Dans la région parisienne, l’âge des jeunes afghans est
plus bas que la moyenne, certains enfants arrivent à Pour deux autres cas signalés d’anciennes filles mères,
12 ou 13 ans. Pour les professionnels, la capacité limi- désormais majeures et qui ont intégré des apparte-
tée de discernement de ces mineurs les pousse à se ments autonomes au sein du même centre, selon l’équipe
mettre dans des situations à risques: ils représentent éducative il existait de forts soupçons de prostitution déjà
un danger pour eux-mêmes. à l’époque et encore maintenant40. Ajoutons qu’une dis-
parition nous a également été signalée.
De même en Suisse et en France, un centre de jour
spécialisé33 ainsi qu’un juge des enfants34 constatent la
présence de très jeunes mineurs originaires des pays «Une mineure africaine venait d’accoucher. Nous
de l’Est, Roms pour certains. Il semblerait, notam- avons contacté le Service des Tutelles car nous
ment en Suisse35 et en Belgique, que les filles soient n’avons pas eu de nouvelles de cette jeune et nous
utilisées très jeunes, dès 9 ans, pour participer à des devions la recevoir. Elle a disparu. Selon le tuteur,
cambriolages. elle ne devait pas être dans une situation de dan-
ger car elle avait laissé ses affaires. Selon lui elle
«L’invisibilité» des filles MENA en Espagne allait revenir. Pourtant cette situation est plus grave!
D’après les directeurs de centres, peu de filles sont Les conceptions sont différentes. Cette mineure
présentes parmi leurs résidents. Sont-elles présentes est dehors avec un nouveau-né. Le tuteur a fait sa
en Espagne sans entrer dans le système de protection? déduction tout seul. Pourtant son téléphone était
Ou ne migrent-elles simplement pas vers cet Etat? dans le dossier. Chacun interprète les faits et a sa
Selon la majorité des professionnels interrogés, les conception du cas».
filles sont présentes sur le territoire espagnol mais Service des migrations, Belgique, interview du
demeurent pour la plupart hors du système de pro- 13 octobre 2008.
tection. Il n’existe pas d’information fiable quant à leur
nombre. Elles migrent vers l’Espagne par des moyens
différents de ceux utilisés par les garçons. Elles vien-
draient avec des passeports, faux pour certains, ou d) Comment arrivent-ils?
de manière clandestine cachées dans des voitures,
accompagnées d’un membre de la famille élargie ou Les mineurs étrangers non accompagnés
d’une connaissance. n’arrivent pas seuls
Rares sont les mineurs qui arrivent totalement seuls,
Les rares cas de filles qui nous ont été rapportés lors toutefois les adultes qui les accompagnent ne sont pas
de nos visites concernent une avocate au sein d’une leurs représentants légaux. Les mineurs qui arrivent
association36 qui traite actuellement le cas de 3 mineures: par avion sont souvent accompagnés de passeurs et
une ukrainienne, une russe et une marocaine. munis de documents d’identité, parfois faux41. Arrivés
22
23. Des enfants de trop en Europe? - 2. L’accueil et la prise en charge des mineurs non accompagnés
à destination, certains jeunes sont oubliés dans les lieux
publics ou accompagnés jusqu’à une association qui les «Je ne sais pas s’il y a une agence pour les dispari-
prendra en charge. Lorsqu’un passeur est intervenu, tions aux Pays-Bas, mais je suis sûr que si je regarde
le mineur devra souvent travailler pour rembourser les photos qui sont sur leur site, je reconnaitrai des
le voyage, au risque d’être exploité. Par voie terrestre, enfants disparus là-bas et qui sont peut-être ici. J’ai par
les filières sont tracées par les adultes. Le parcours exemple deux jeunes de 9 ans et de 14 ans. Ils sont
des migrants en provenance d’Afrique subsaharienne frère et sœur. Ils viennent des Pays-Bas. Ce n’est pas
est souvent périlleux. Les jeunes migrants arrivent possible que leur disparition du centre aux Pays-Bas
également par camion. C’est le cas des mineurs maro- n’ait pas été signalée! Rien n’est coordonné.»
cains qui rejoignent l’Espagne. Ils se cachent dans les Directeur, centre d’accueil pour MENA, Belgique,
véhicules qui embarquent ensuite sur un bateau pour interview du 2 octobre 2008.
l’Europe. Ces enfants montent à bord de camions
parfois en marche. Des accidents mortels ont lieu. Les
mineurs viennent également par pateras, de petites
embarcations de fortune. Cela concerne les mineurs e) Processus de prise en
originaires d’Afrique subsaharienne ainsi que les jeunes
maghrébins qui tentent de gagner l’Europe. charge d’un MENA
Repérage et arrivée dans le centre
«Je m’appelle S. J’ai 17 ans. Je suis albanais de Serbie. Les jeunes migrants qui intègrent les centres d’accueil
Je suis arrivé il y a un an en Belgique. Je me suis caché sont repérés de différentes manières. Ils sont inter-
dans un camion pendant 3 jours. J’ai payé 2000 euros. ceptés par la police ou lors de maraudes effectuées
Il y avait moi et un autre garçon. On avait un mètre par des associations. Certains jeunes se présentent
pour vivre, pour les toilettes et pour manger». d’eux-mêmes aux offices des migrations ou aux por-
Mineur, centre d’accueil pour MENA, Belgique, tes des ONG, parfois sur les conseils de passeurs, de
interview du 15 novembre 2008. citoyens et même de MENA.
• En Belgique, toute autorité qui a connaissance de la
présence d’un MENA sur le territoire, doit en infor-
Routes empruntées par les mineurs mer le Service des tutelles42 créé au sein du Service
Il ressort de nos enquêtes que les Marocains et les Public Fédéral de la Justice, équivalent du Ministère
Algériens transitent par l’Italie et l’Espagne avant d’ar- de la Justice. Cet organe recueille les informations
river en France ou en Belgique. Ajoutons que depuis nécessaires à l’identification du jeune. En cas de doute
la France et la Belgique, certains jeunes Roms font sur l’âge, un examen médical est effectué. Si le statut
également des aller-retour vers l’Espagne et l’Italie. de MENA est reconnu, le jeune est conduit vers l’un
des deux Centres d’Observation et d’Orientation dans
Selon certains directeurs de centres d’accueil en Bel- lequel il est placé.
gique, des mineurs originaires d’Afrique ont transité
via la Hollande avant d’arriver. • En France, le Parquet reçoit les signalements des
MENA, souvent averti par la police. Il peut demander
une détermination médicale de l’âge. En cas d’urgence,
«Il y a des enfants qui viennent de Hollande et qui il peut ordonner le placement immédiat du mineur,
arrivent en Belgique comme les jeunes africaines soit en foyer, soit dans un établissement hospitalier,
par exemple. Elles prennent l’avion à Amsterdam et ou bien au service de l’aide sociale à l’enfance. Il doit
arrivent à Anvers. Elles pensent être à Bruxelles donc alors saisir le juge des enfants dans les 8 jours43.
elles ne savent pas dire par où elles sont passées
quand il faut reconstituer les faits.» En vertu de l’article 375 du Code civil relatif à l’enfance
Directeur, centre d’accueil pour MENA victimes en danger, le juge des enfants intervient au titre de
de traite des êtres humains, Belgique, interview l’assistance éducative quand la santé, la sécurité, la
du 3 octobre 2008. moralité, ou les conditions de l’éducation d’un mineur
sont remises en question. Quand le juge décide d’ac-
corder une protection au mineur, il délivre une ordon-
nance provisoire de placement, qui permet de confier
23
24. Des enfants de trop en Europe? - 2. L’accueil et la prise en charge des mineurs non accompagnés
le mineur au service de l’aide sociale à l’enfance, et Ceux qui n’ont pas demandé l’asile en Suisse restent
détermine le lieu d’accueil du mineur. dans la clandestinité. Un juge des mineurs suisse nous
a fait part du cas des jeunes algériens qui retournent
Chaque département assure et finance la protection dans la rue après avoir été interceptés.
de l’enfance en danger44, soit par ses services de l’Aide
sociale à l’enfance ou bien par le biais d’associations
ou d’établissements publics habilités. L’Aide sociale à «On ne peut rien faire. Pour la police des étrangers,
l’enfance supervise le suivi éducatif des mineurs qui les sans-papiers algériens ne sont pas renvoyables
lui sont confiés. donc on les laisse dans la rue. Et même si on subit
les reproches des associations de droits de l’enfant et
Signalons en région parisienne l’existence d’un dispositif des autorités européennes, ces jeunes sont contre les
d’Etat de repérage, de mise à l’abri, et d’accompagne- mesures éducatives, ils ne sont pas demandeurs.»
ment des mineurs en errance, depuis janvier 2003. Juge des mineurs, Suisse, interview du 22 janvier
Des structures associatives servent à l’évaluation et 2009.
l’observation, en accompagnant les enfants de façon
personnalisée sur le plan sanitaire, socio-éducatif et
juridique, ainsi qu’à l’orientation vers les structures de • En Espagne, l’article 172 du Code civil47 définit la
prise en charge de droit commun, c’est-à-dire celle de situation de desamparo, de détresse, qui peut être celle
l’Aide sociale à l’enfance. Pendant cette mise à l’abri, des mineurs, et la protection à laquelle elle donne lieu.
les enfants sont sans titre puisqu’ils ne sont pas placés Les Communautés autonomes sont responsables de
juridiquement, ils n’existent pas sur le plan du droit. la protection de l’enfance et de la prise en charge
des MENA. La pratique peut varier d’une région à
En France, selon le directeur de l’Aide sociale à l’en- l’autre.
fance d’un département, le Parquet lui confie systéma-
tiquement les mineurs de moins de 16 ans. Au-delà, La tutelle
certains peuvent aller dans un centre de la Protection En Belgique, bien que les mineurs Rom intègrent les
judiciaire de la jeunesse en cas de délits. Les autres centres d’accueil, le Service des tutelles les prend en
retournent dans la rue45. charge mais ne désigne pas de tuteur pour ces enfants
s’ils sont originaires d’un des pays de l’espace écono-
• En Suisse, la seule possibilité de se trouver légale- mique européen48. En effet, la loi belge dispose que les
ment sur le territoire est l’asile. Les mineurs doivent mineurs originaires d’un pays de l’espace économique
d’abord se rendre dans l’un des quatre centres d’en- européen n’entrent pas dans la catégorie juridique
registrement et de procédure où leur demande d’asile des MENA.
est enregistrée. Les mineurs sont ensuite attribués à
un canton, proportionnellement à l’importance de la Pour pallier à ce manque. le Service signalement des
population. mineurs européens non accompagnés en situation de
vulnérabilité, dit SMEV, a été créé en 2007. Mais pour
Selon l’une de nos sources, il y a environ un an et les professionnels, l’absence de tuteur est source de
demi, beaucoup de Nigérianes arrivaient en zone d’at- complication49.
tente de l’aéroport de Genève avant de devoir se
rendre au centre d’enregistrement de Vallorbe. Mais
la plupart n’arrivait pas à Vallorbe. La police fédérale a «Avant que la Roumanie ne rentre dans l’Union euro-
travaillé dessus. Ces filles se prostituaient en Allemagne péenne, les mineurs avaient plus de droits. Maintenant
et en Italie, on a retrouvé les mêmes empreintes mais les ils n’ont pas de tuteur, et où vont-ils rester? Les garçons
noms étaient différents. C’est une organisation qui existe font des choses criminelles et les filles sont dans la
depuis chez eux. Une filière a été arrêtée mais d’autres prostitution. Pour moi ce n’est pas normal!»
disparaissaient encore46. Médiateur culturel Rom, Belgique, interview du
12 novembre 2008.
Pour pallier à cela et s’assurer que les mineurs arrivent
dans le centre dans lequel ils ont été orientés, de nom-
breuses structures, en Suisse et ailleurs, vont chercher
les mineurs et les conduisent jusqu’au centre.
24
25. Des enfants de trop en Europe? - 2. L’accueil et la prise en charge des mineurs non accompagnés
D’autres acteurs déplorent le fait que dans certains cas, au maximum une protection à la carte qui varierait en
un tuteur ne soit pas nommé avant plusieurs semaines. fonction des spécificités de chaque mineur.
Certains ne sont pas des professionnels et d’autres
gèrent 30 à 40 dossiers, ce qui rend difficile un travail • En Belgique, après son passage au Service des tutel-
de qualité. Ajoutons qu’un tuteur interrogé nous a les, le jeune est conduit vers l’un des deux Centres
avoué que son travail était très peu contrôlé50. d’Observation et d’Orientation. Il s’agit de structures
ouvertes55 de premier accueil et d’hébergement qui
• En France, d’après le directeur d’un centre, la tutelle accueillent aussi bien les mineurs demandeurs d’asile
est longue à mettre en place pour les mineurs qui que non demandeurs d’asile, indépendamment de
approchent des 17 ans. De plus, rappelons que le juge l’endroit où ils ont été interceptés. Signalons que le
des enfants n’est pas dans l’obligation de saisir le juge MENA repéré à l’aéroport est dirigé vers l’un de ces
des tutelles. Il n’y a pas de pratique professionnelle centres et a le droit au même dispositif que les autres
similaire d’un département à l’autre. Un magistrat enfants. Il a accès au territoire belge mais conserve
rencontré préconise une directive du Ministère de la un statut fictif d’extraterritorialité le temps que sa
Justice pour donner des repères. Ces jeunes doivent situation soit étudiée. Les deux centres disposent d’une
avoir un garant selon lui51. base de données interne pour l’enregistrement de
l’enfant. Une photo du mineur est prise. Le centre va
• En Suisse, selon l’article 17 al. 3 de la loi sur l’asile, également travailler sur l’un des trois statuts possibles
les autorités cantonales compétentes désignent une pour le jeune: l’asile, le statut de victime de la traite
personne de confiance chargée de représenter les des êtres humains56, et ceux qui n’ont pas introduit de
intérêts du MENA dans les premières étapes de la demande d’asile ou qui ont été déboutés (circulaire
procédure52. Ensuite, les autorités cantonales compé- MENA 2005).
tentes ou une association sont mandatées par l’autorité
tutélaire pour être le tuteur ou le curateur du MENA Au cours de l’accompagnement du jeune, un bilan psy-
sur la base des articles 360 ss du Code civil53. chosocial sera dressé afin d’établir le projet de prise en
charge le plus adéquat pour le mineur. Cela permettra
• En Espagne, l’autorité responsable de la prise en ainsi de l’orienter vers un centre de seconde ligne qui
charge des MENA est aussi le tuteur, ce qui conduit soit le mieux adapté à ses besoins. Le jeune peut théo-
parfois à des conflits d’intérêts. A Madrid par exemple, riquement rester un mois dans le centre.
l’ Institut madrilène du mineur et de la famille est l’autorité
chargée de l’accueil du mineur mais est également le De son côté le Service des tutelles désigne un tuteur,
tuteur de l’enfant. Selon plusieurs acteurs, dans cer- en principe professionnel, qu’il soit salarié (d’une asso-
taines régions, les règles de suivi et de protection des ciation) ou indépendant. Son travail consiste à trouver
mineurs sont inégalement appliquées. une solution durable pour le mineur. Il défend ses
intérêts et l’accompagne dans la procédure57.
Selon le Défenseur du peuple rencontré à Madrid, la
radiation du mineur après 15 jours sans nouvelle de • En France, selon l’âge du mineur et les places dis-
ce dernier est illégale. Selon lui, les seules possibilités ponibles, les jeunes migrants sont hébergés dans un
de mettre fin à une tutelle sont: en cas de retour foyer de l’enfance (départemental ou associatif), un
dans le pays d’origine, si le jeune atteint 18 ans, ou si hôtel social pour les plus âgés, une famille d’accueil,
le jeune est enregistré dans une autre communauté ou dans une structure spécialisée. Certaines struc-
autonome. tures disposent de bases de données internes pour
l’identification des mineurs.
La vie quotidienne au sein du centre
Au sein des centres d’accueil, un certain nombre de Le juge des tutelles peut être saisi pour la représenta-
règles doivent être observées par les mineurs. Certains tion légale du mineur, mais cela n’a rien d’obligatoire58.
centres interdisent les téléphones portables, les visites Quand le mineur est pris en charge par l’Aide sociale
pendant quelques jours, ou n’autorisent pas les sorties à l’enfance, le juge des tutelles peut confier la repré-
non accompagnées lors des 15 premiers jours. sentation légale du mineur au président du Conseil
général qui va la déférer au service de l’Aide sociale
Les règles imposées sont appliquées avec plus ou moins à l’enfance.
de flexibilité selon les structures ou bien selon les jeu-
nes. Pour certains professionnels, il convient d’éviter
25
26. Des enfants de trop en Europe? - 2. L’accueil et la prise en charge des mineurs non accompagnés
En France, selon l’Aide sociale à l’enfance d’un dépar-
tement, un certain nombre de mineurs admis disparaît, «Je ne peux pas parler en toute sécurité mais il y a
souvent dans les premiers jours. C’est notamment le des choses très graves. Un directeur de programme
cas des mineurs roumains ou originaires des pays de dans un centre a l’autorité suffisante pour convain-
l’Est. Quelques données de 2007 illustrent cette réalité cre les mineurs d’avoir des relations sexuelles avec
et concernent des enfants âgés de 11 à 14 ans. lui, en échange de plus de protection, de plus de
ressources.
Je sais qu’il y a un des programmes où on lui a
«Un premier mineur roumain est arrivé le 14 mars et enlevé une partie de ses subventions car des activités
est sorti le 15 mars, un second est arrivé le 2 mai et bizarres avaient lieu. Mais cet adulte est toujours
est sorti le 3 mai, un troisième est arrivé le 4 août et en poste.»
est sorti le 6 août, un quatrième est arrivé le 13 août Educateur, centre d’accueil de jour pour MENA,
et est sorti le 14 août, un cinquième est arrivé le 31 Espagne, interview du 23 avril 2009.
mai et est sorti le 1er juin et enfin, un mineur croate
est arrivé le 6 mars et est parti le 17 mars.»
Directeur, Aide sociale à l’enfance du département Notons en outre le lien qui peut être fait avec les risques
X, France, interview du 16 décembre 2008. qu’impliquent certaines pratiques. A trois reprises,
lors de nos enquêtes, des professionnels nous ont
avoué héberger des jeunes à leur domicile personnel.
• En Suisse, les mineurs seront placés en famille d’ac- Les deux premiers cas concernent des travailleurs
cueil pour les plus jeunes, dans un centre pour MENA sociaux qui traitent le dossier de jeunes et qui n’ont
jusqu’à 18 ans s’il en existe, dans un appartement pas d’autres choix que de les accueillir plutôt que de
autonome, dans un foyer pour adultes ou parfois même les laisser dans la rue. Dans le troisième cas, il s’agit
dans un abri anti atomique. d’un tuteur qui emmène certains de ses pupilles en
vacances avec sa famille. A contrario, d’autres refusent
• En Espagne, chaque service de protection de chaque catégoriquement cette solution, estimant que cela peut
communauté autonome sera chargé de l’accueil et de s’avérer dangereux aussi bien pour le jeune que pour
la tutelle du mineur. En cas de doute, le mineur sera le professionnel.
soumis à un test osseux, ordonné par le procureur
des étrangers59. La gestion des centres d’accueil en décision concernant la suite du parcours
Espagne relève des entités publiques ou est déléguée du MENA
à des associations. Après son séjour dans une première structure, plu-
sieurs éventualités sont possibles: le mineur reste
Comme dans d’autres pays où la gestion est décentrali- dans le premier centre jusqu’à sa majorité ou il est
sée, en Espagne, les communautés autonomes sont com- orienté vers un centre mieux adapté en fonction de
pétentes pour la prise en charge des MENA. Chaque ses besoins. S’il approche de la majorité, il peut avoir
administration régionale reçoit de l’argent en fonction la chance d’intégrer un appartement autonome, mais
du nombre de MENA accueillis. Selon le Défenseur du les places sont rares.
peuple, cela incite à compter les mêmes mineurs deux ou
trois fois puisque plus un centre accueillera de mineurs, • L’orientation vers un centre fermé. Certains mineurs
plus il sera subventionné. Cela conduit à une réelle sont orientés vers un centre fermé. En Suisse, cette
distorsion des chiffres. orientation est faite soit par les autorités administra-
tives pour cause de migration (dans des institutions
Prévention des violences en institution ad hoc, souvent fermées), soit par le juge des mineurs
Les institutions s’occupant d’enfants ne sont pas à parce qu’ils ont commis des délits. En Suisse, selon le
l’abri de comportements violents à l’égard des mineurs, directeur d’une structure, il lui arrive de placer un jeune
ce qui peut être déterminant dans le désir de fugue qui se met en danger ou qui n’a pas un comportement
d’un mineur, que les risques proviennent des mineurs correct en observation pendant 48 heures dans une
eux-mêmes, de comportements du personnel ou d’in- prison pour mineurs. Il faut pour cela présenter une
tervenants extérieurs. Signalons qu’un cas d’échange demande motivée au Service de protection de la jeu-
de services avantageux de la part du centre contre nesse qui autorise le transfert61. Ces arrêts disciplinaires
services sexuels de mineurs nous a été signalé en ne peuvent excéder 7 jours.
Espagne.
26
27. Des enfants de trop en Europe? - 2. L’accueil et la prise en charge des mineurs non accompagnés
On constate également une tendance de la pratique En effet, une fois la majorité atteinte, la tutelle prend fin
qui consiste à répondre directement à la délinquance et le jeune doit en général quitter le centre dans lequel
de MENA par des courtes peines privatives de liberté, il était accueilli jusqu’à ce jour. Beaucoup entreront
pour des jeunes qui vont être renvoyés et pour lesquels dans la clandestinité, les autres peuvent faire l’objet
les juges pensent que soin et assistance ne pourront d’un retour dans un pays qu’ils ont, pour certains,
être mis en place faute de temps. quitté enfant. La limite de la majorité pèse à la fois sur
les mineurs et les acteurs sociaux qui hésitent à se
• L’orientation vers un centre thérapeutique. En Espa- lancer dans une prise en charge et un travail éducatif
gne, dans la communauté de Madrid, il arrive que les qui pourrait se terminer au bout de quelques mois
enfants qui présentent des difficultés d’adaptation au seulement. Les professionnels regrettent le manque
sein d’une structure soient orientés vers un centre de structures d’accueil et d’accompagnement pour
thérapeutique, sans qu’aucune décision judiciaire n’ait les jeunes majeurs.
été prise. En Suisse, il arrive exceptionnellement que
des mineurs soient placés dans des hôpitaux psychiatri- C’est notamment le cas en Belgique, en Suisse et en
ques pour adultes. Certains professionnels demandent Espagne où il n’existe pas encore de mesures généra-
la création de centres thérapeutiques pour mineurs lisées de prestations d’assistance aux jeunes majeurs.
dans lesquels il faudrait allier mesures éducatives et Certains auront cependant la chance de bénéficier
thérapeutiques. d’un hébergement et d’un suivi proposés par des
associations63.
«En ce moment, on reçoit un jeune. Il ne s’entend Les possibilités de régularisation sont alors les docu-
pas avec l’équipe du centre X. L’équipe veut l’envoyer ments de séjour proposés aux adultes. L’Espagne laisse
au centre thérapeutique Y pour traiter son com- 3 mois au jeune de 18 ans muni d’une autorisation de
portement. Dans ce centre Y, les jeunes prennent séjour pour la renouveler après expiration. Le mineur
des médicaments et peuvent être attachés. C’est un qui n’en avait pas peut, s’il remplit les conditions, accé-
centre thérapeutique où les jeunes sont placés sans der à une autorisation de séjour pour circonstances
mesure judiciaire. Aucun jeune que je connais et qui exceptionnelles64.
est entré là-bas n’est ressorti avec un diagnostic. Ce
placement est utilisé comme une punition. En France, il existe un moyen de prolonger la pro-
tection d’un jeune ayant bénéficié des services de
Selon nous, il faut une décision judiciaire pour placer protection de l’enfance, et ce jusqu’à 21 ans: le
ce jeune dans un tel centre. Le directeur lui a juste contrat jeune majeur. Il est accordé par le juge des
dit: «tu vas aller au centre Y». C’est une décision enfants ou le Conseil général, et suspend, en théorie, le
administrative. Le mineur s’est enfui et est venu risque d’expulsion. La réforme de juillet 2006 donne la
nous voir. On ne sait pas où il va dormir ce soir. possibilité aux jeunes pris en charge avant leur 16ème
Il y a eu une réunion avec le directeur du premier anniversaire par le service de protection de prétendre
centre X, le directeur du centre thérapeutique Y et obtenir une carte de séjour temporaire vie privée et
le jeune pour lui annoncer le nouveau placement. Ils familiale sous certaines conditions (formation suivie,
ont demandé au jeune de signer un document, il a liens avec la famille restée au pays d’origine, et inser-
refusé. Ils voulaient la signature du jeune pour faire tion dans la société française) dans l’année suivant
croire que c’était volontaire.» leur majorité. Les mineurs confiés aux services de
Avocat, association d’aide aux MENA, Espagne, protection avant l’âge de 15 ans peuvent quant à eux
interview du 23 avril 2009. demander à être naturalisés français.
Fin brutale de la prise en charge à 18 ans
Le stade des 18 ans modifie la situation du MENA, à
tel point que ce passage est souvent discuté62. Cepen-
dant, quelles que soient les techniques utilisées pour
la détermination de l’âge, les normes internationales
préconisent que le doute profite à l’individu.
27
28. Des enfants de trop en Europe? - 2. L’accueil et la prise en charge des mineurs non accompagnés
Notes de la section 2
17
Revue Migrations études, synthèse sur les travaux sur l’immigration et la présence étrangère en France, Les mineurs isolés
étrangers en France, numéro 109, septembre-octobre 2002. http://www.infomie.net/Pourquoi-partir.html.
18
Selon cette personne, ces mineurs devraient pouvoir prétendre au statut de réfugié, «afin de dénoncer le manque d’action de
l’Etat quant à leurs besoins premiers». Educateur, centre d’accueil de jour pour MENA, Espagne, interview du 23 avril 2009.
19
Il y a des différences dans les chiffres. Pourtant il ne s’agit pas de caisses de bananes mais de mineurs, or on n’a pas les mêmes
chiffres entre l’Office des étrangers, le Commissariat général aux réfugiés et apatrides et le Service des tutelles.» Service des
migrations, Belgique, interview du 13 octobre 2008.
20
Service des migrations, Belgique, interview du 10 octobre 2008.
21
Office des étrangers belge, Inscriptions demandes d’asile faites par des mineurs (le jour même de la demande d’asile), 2008,
site Service public fédéral Intérieur, http://www.dofi.fgov.be/fr/statistieken/minderjarigen_2008.pdf.
22
Office français de protection des réfugiés et apatrides, Rapport d’activité 2008, p. 13.
23
«Droits de l’enfant en France: au pied du mur - rapport alternatif au comité des droits de l’enfant des NU», DEI, octobre 2008.
Consulter les annexes 20 et 21, http://www.anafe.org/download/mineurs/RA_DEI_CRC.pdf.
24
Office des migrations Suisse, Requérants d’asile mineurs non accompagnés (RMNA) en Suisse, Tableau comparatif des années
2006, 2007 et 2008, site Office fédéral des migrations - Confédération Suisse,
http://www.bfm.admin.ch/etc/medialib/data/migration/statistik/asylstatistik/statistiken_uma.Par.0006.File.tmp.pdf.
25
Circulaire relative au séjour des mineurs étrangers non accompagnés, 15 septembre 2005. Cette circulaire a pour objet, d’une
part de régir les compétences des deux services «mineurs»de l’Office des étrangers et, d’autre part, d’expliciter la procédure
d’examen relative au séjour des MENA.
26
Idem note 21.
27
Idem note 22.
28
Idem note 24.
29
Idem note 21.
30
Idem note 22.
31
Idem note 24.
32
Nathalie HEPPELL, Rapport d’enquête pour la Fondation Terre des hommes, Les mineurs étrangers non accompagnés / sépa-
rés au Canada, mars 2009.
33
Association de soutien aux mineurs isolés étrangers, France, interview du 8 décembre 2008.
34
Juge des enfants, France, interview du 11 décembre 2008.
35
Juge des enfants, Suisse, interview du 22 janvier 2009.
36
Association d’aide aux réfugiés, Espagne, interview du 24 avril 2009.
37
Morante, L. & Trujillo, M. (2007): «Las niñas y adolescentes que emigran solas a España. Las influencias o determinaciones derivadas
de su condición de mujeres», Actas del Coloquio «La migración de menores no acompañados en Europa. Los contextos de origen, las
rutas migratorias, los sistemas de acogida», Poitiers France 10-11 octobre 2007, Observatoire international de justice juvénile.
38
Service des migrations, Belgique, interview du 13 octobre 2008.
39
Directeur, centre d’accueil pour MENA, Belgique, interview du 2 octobre 2008.
40
Selon le directeur du centre, les soupçons se basaient sur «les heures des allées et venues, les évidences vestimentaires, les nouveaux
téléphones et les hommes qui passaient dans les appartements des femmes». Directeur, centre d’accueil pour MENA, Suisse, inter-
view du 21 janvier 2009.
41
L’un de nos interlocuteurs émet l’hypothèse d’une complicité des compagnies aériennes dans les pays d’origine du mineur. Chef du
service éducatif, centre d’accueil pour MENA, France, interview du 28 janvier 2009.
42
La tutelle des MENA est régie par la loi suscitée du 24 décembre 2002, entrée en vigueur le 1er mai 2004. Parmi ses missions, le
Service des tutelles prend contact avec les autorités responsables en matière d’hébergement, procède à l’identification du mineur,
recrute et forme les tuteurs et supervise le travail de ces derniers.
28
29. Des enfants de trop en Europe? - 2. L’accueil et la prise en charge des mineurs non accompagnés
43
Selon un magistrat, certains procureurs attendent le 7ème jour car ils savent que l’enfant va partir. Juge des enfants, France, interview
du 11 décembre 2008.
44
En vertu de l’article L 222-5 du Code d’action sociale et des familles, les jeunes mineurs accueillis sont sous la protection et la respon-
sabilité du président du Conseil général. Ce dernier, par le biais de l’Aide sociale à l’enfance, est dépositaire de tous les mineurs isolés
étrangers en danger.
45
Directeur de l’Aide sociale à l’enfance du département X, France, interview du 16 décembre 2008.
46
Association, Suisse, interview du 10 février 2009.
47
Selon cet article «est considérée comme situation de desamparo celle provoquée par la non application, application insuffisante ou
inadaptée des devoirs de protection établis par les lois pour la garde des mineurs, lorsque ceux-ci se trouvent privés de l’assistance
morale ou matérielle nécessaire.»
48
Rappelons que l’espace économique européen se compose de tous les Etas membres de l’Union Européenne auxquels il faut ajouter
l’Islande, la Norvège et le Liechtenstein.
49
«Il n’y a pas de ressource pour les orienter, il n’y a pas de parcours d’asile. Le SMEV est une coquille vide. Il faudrait la nomination d’un
tuteur.» Directeur, centre d’accueil, Belgique, interview du 8 octobre 2008.
50
Tuteur pour MENA, Belgique, interview du 13 novembre 2008.
51
Procureur, France, interview du 11 décembre 2008.
52
La notion de personne de confiance doit être comprise dans un sens large. Il peut s’agir d’un tuteur ou d’un curateur au sens des
articles 360 ss du Code civil ou d’une autre personne de confiance telle que définie par la jurisprudence (JICRA 2006/14).
53
A titre d’exemple, pour le canton de Genève, le Tribunal tutélaire mandate le Service de protection des mineurs pour être
curateur du mineur. De même à Fribourg, c’est le Service de l’enfance et de la jeunesse qui est mandaté par le Tribunal tutélaire
pour être curateur. Dans le Jura, c’est une association qui assume ce rôle.
54
Voir développement concernant le conflit d’intérêt, p 34.
55
Les centres ouverts ont pour mission l’accueil, qui ne peut se faire que dans un climat de confiance. Ils permettent aux étran-
gers d’avoir un temps d’intégration. On les oppose aux structures dites «fermées», dans lesquelles l’étranger n’est pas libre de
ses mouvements, et ne peut pas entrer et sortir du centre. A titre d’exemple, la loi belge (A-R 2 août 2002) définit les centre
fermés comme des «lieux gérés par l’Office des étrangers, aménagés pour l’accueil des personnes soumises à une mesure
administrative de détention, de mise à la disposition du Gouvernement ou de maintien».
56
Nous reviendrons sur ce sujet de la traite des êtres humains au cours de notre analyse.
57
Il veille à ce que le droit des étrangers soit respecté et demande l’aide d’un avocat spécialisé. Il décide du placement du pupille
dans une famille ou de faire appel aux autorités compétentes pour assurer l’hébergement. Il veille à ce que le MENA puisse
suivre un enseignement et ait une aide psychologique et médicale, des conditions d’hébergement correctes et que ses convic-
tions soient respectées. Pour plus de détails, consulter le site Service public fédéral Justice, http://www.just.fgov.be/fr_htm/
information/htm_justice_a_z/mena/qf.html#q14.
58
«Il faut prouver l’incapacité des parents à exercer l’autorité parentale sur l’enfant. Si les parents téléphonent chaque semaine,
la tutelle n’est pas possible car l’autorité parentale s’exerce bien. Certains juges des tutelles sont plus ou moins regardant,
d’autres sont submergés et n’ont pas le temps de s’en occuper.» Juge des enfants France, interview du 11 décembre 2008.
59
En 2008, 4771 tests osseux ont été ordonnés dans toute l’Espagne. 1325 personnes ont été déclarées majeures, 1988 seraient
mineures et le reste concerne des affaires pendantes. Procureur, Espagne, interview du 27 avril 2009.
60
Défenseur du peuple, Espagne, interview du 2 avril 2009.
61
Directeur, centre d’accueil pour MENA, Suisse, interview du 21 janvier 2009.
62
Il faut noter ici que dans certaines régions du monde, l’âge administratif ne correspond pas à l’âge biologique pour cause d’en-
registrement tardif de la naissance par les parents, ce qui rend l’âge de toute façon approximatif.
63
Nous reviendrons sur cette question lors de nos recommandations.
64
Cette autorisation de séjour est prévue au dernier paragraphe de l’article 92.5 du décret royal 2393/2004 du 30 décembre
2004 précité.
29
31. 3
«Disparitions»: une ampleur
méconnue et des chiffres
incertains
Aucun Etat n’est en mesure
de donner des chiffres précis
concernant le nombre de MENA
présents sur son territoire. Il en
va de même pour ce qui est des
données relatives au nombre
des jeunes qui quittent les struc-
tures d’accueil. Les données qui
suivent nous ont été transmises
par le personnel de certaines
structures visitées.